Mais pourquoi des animaux peuvent mettre les trains en retard ?
Il y a peu, sur Twitter, je lisais quelques personnes s’étonner d’entendre parler de « divagation de bestiaux » pour justifier le retard de leur train. « Une bonne idée pour un autre billet sur le blog » que je me suis dis. Au boulot !
On vous a peut être parlé d’animaux sur la voie, de collision avec des animaux ou, plus rarement, on a employé l’expression « divagation de bestiaux ». Voici ce qui se cache derrière tout ça.
- Quels sont les risques ?
Au premier abord, on pourrait penser qu’un animal heurté par un train, c’est la mort assurée pour la bête et un peu de tôle froissée pour le train. Ce n’est pas le cas. Les conséquences dépendent avant tout de la taille de l’animal mais, si une vache fait de lourds dégâts, un chien peut très bien endommager le matériel.
Sous une rame, se trouvent en effet quelques organes vitaux pour la sécurité. Le système de contrôle de vitesse ainsi que celui contrôlant le respect des signaux par le conducteur comportent des dispositifs sous la rame qui peuvent être endommagés par le passage d’un animal sous le train. Il en est de même pour le système de freinage.
Toute collision peut donc causer des dommages nécessitant une intervention immédiate du conducteur sur sa rame pour contrôler son bon fonctionnement. Selon les dégâts constatés, la rame peut devoir être retirée du service à la prochaine gare ou même dans l’impossibilité de repartir.
Il a même pu arriver, mais le cas est extrêmement rare, qu’une collision fasse dérailler un train. C’est le cas sur l’image ci-dessous. Deux ânes ont fait sortir la locomotive des rails ce qui à lourdement endommagé la voie et la caténaire.
- Que se passe t’il lorsque le train percute un animal ?
Dans le cas où un train percute un animal, si le conducteur constate la moindre anomalie sur sa rame ou juge que le choc était important, c’est l’arrêt immédiat. Le mécanicien descendra examiner son train. A ce stade, les trains suivants seront donc arrêtés en gare ou en pleine voie le temps de l’inspection.
Selon le cas, le conducteur devra peut être marcher sur d’autres voies pour vérifier le bon état de son train. Il demandera alors aux agents circulation d’assurer sa protection en bloquant la circulation des trains devant emprunter ces voies. Selon ses constatations, le conducteur pourra repartir normalement ou avec des restrictions de vitesse ou, si la rame est trop endommagée ne pas repartir et faire une demande de secours. Le retard de ce train et des suivants pourra donc être de quelques minutes comme d’une ou deux heures.
- Et quand il n’y a pas eu de collision ?
Quand un conducteur repère des animaux le long de la voie, deux cas s’appliquent.
S’il s’agit d’animaux sauvages, nous partons du principe qu’ils sont craintifs et vont donc s’enfuir au passage des trains et qu’ils ne présentent donc pas un gros risque de collision.
Cela se complique si, pour reprendre les termes exacts de la réglementation, il s’agit « d’animaux d’élevage, seuls ou en troupeau, dont la taille est au moins égale à celle d’un mouton ». Les animaux d’élevage sont habitués à l’Homme et on peut donc considérer qu’ils ne seront que peu effrayés par les trains. Par ailleurs, s’il sont au moins aussi grand qu’un mouton, on considèrera également que leur taille fait qu’il représentent un vrai danger en cas de collision. On se trouve dans le cas d’une divagation de bestiaux.
Le conducteur qui constate cette divagation de bestiaux va immédiatement le signaler aux agents circulation qui prendront alors les mesures nécessaires pour éviter toute collision.
Pour commencer, ils vont arrêter immédiatement tous les trains se dirigeant vers l’endroit où les bestiaux ont été signalés. Ils aviseront ensuite le régulateur de la ligne afin qu’il puisse anticiper les retards au mieux. Ils avertiront également les agents de maintenance de la voie. Ces agents se rendent alors sur place pour tenter de retrouver les bestiaux et/ou leur propriétaire afin de les éloigner des voies. Comme quoi, à la SNCF, il faut savoir tout faire.
- La reprise de la circulation.
Comme il n’est pas sûr que les animaux vont bloquer les voies, la circulation des trains ne va pas être arrêtée totalement. Les agents circulation vont alors remettre aux conducteurs se dirigeant vers les bestiaux un bulletin d’ordre. Ce bulletin ordonne aux conducteurs de rouler en marche prudente sur une zone d’un kilomètre de part et d’autre de l’endroit où les bestiaux ont été vus.
Pourquoi une telle distance ? Le danger n’est pas un arbre qui menace de tomber sur la voie mais des animaux qui sont donc susceptibles de se déplacer et de ne pas être là où le premier conducteur les a signalé.
Dans cette même logique, le bulletin d’ordre impose également au conducteur de faire part de ses constatations aux agents circulation après avoir franchi la zone. Après son passage, il les informera de la présence ou non des bestiaux ainsi que de leur emplacement.
Les agents circulation pourront donc adapter le bulletin remis au train suivant en modifiant la zone à parcourir en marche prudente en fonction du dernier endroit où les animaux auront été vus.
Je pense que vous aurez bien compris que, le temps que chaque train s’arrête pour obtenir son bulletin d’ordre et franchisse la zone dangereuse à vitesse très réduite, les retards peuvent vite s’allonger.
- Quand reprend on la circulation normale ?
Les agents circulation peuvent recommencer à faire circuler les trains normalement dès qu’ils ont obtenu l’assurance que tout danger est écarté. Cette assurance est donnée soit par un conducteur soit par l’agent du service de la voie qui s’est rendu sur place.
Sur un ligne très fréquentée, le retour à la normale de la circulation peut prendre encore un bon moment le temps. C’est là que le régulateur interviendra en modifiant des dessertes ou supprimant des trains afin de replace au plus vite les rames au bon endroit pour que le service revienne à la normale.
Et voilà, vous savez tout ! Des points qui ne vous paraissent pas clairs ? N’hésitez pas à poser vos questions en commentant l’article.
Souvenirs de jeunesse: un train Aurillac-Clermont (?).
Arrêt soudain. Au bout d’un moment message du conducteur: « Nous vous prions de nous excuser pour cet arrêt, des vaches dorment sur la voie ». Je ne peux m’empêcher de sourire en imaginant les agents SNCF allant réveiller de braves Salers ayant décidé que le balast était un bon endroit pour piquer une sieste… 😉
Merci pour ces explications ! 🙂
Certaines personnes (généralement qui gueulle quand le train est en retard) ne comprenne pas que c’est pour leur sécurité.
Très bon billet Sylvain. L’explication est très claire maintenant re-dirige les twittos incrédules à ce sujet vers ton bloc.
Il y a deux ans environ un pauvre troupeau de moutons, désireux d’aller voir si l’herbe était plus verte côté voie 1 que voie 2, traverse au passage d’une UM de TGV. La première rame a percutée cinquante bêtes et elle a été logiquement différée à la gare suivante distante de quelques kilomètres. Le berger était désolé l’équarrisseur se frottait les mains et les passagers étaient en retard !
Merci pour ces explications, ca m est arrive ce matin sur un tgv et je me posais la question.
Je me demande aussi s il est possible d avoir une bonne visibilite quand on va a 300km / heure en gros est il aise de reperer un animal dansles cas ou il n y a pas colision mais juste avertissement pour declencher la marche de prudence.
un exemple avant hier avec un ter ayant percuté une vache et qui semble avoir perdu toute capaciter à freiner. http://www.franceinfo.fr/actu/faits-divers/article/la-grande-peur-des-passagers-d-un-ter-fou-740303
Bonjour,
Je suis formatrice auprès de conducteurs allemands qui circulent en France.
Il viennent au centre de formation à Strasbourg pour du maintien linguistique en langue technique et en langue générale. je cherche des textes sur lesquels les faire travailler. Seriez-vous d’accord que j’utilise ce texte sur la « divagation de bestiaux », en mentionnant bien sûr comme auteur de l’article.
Merci pour votre réponse.
Et si la souche du carnet d’ordre est vide et que vous n’en avez plus d’autres de disponible? Cette procédure parait complètement archaïque. Je comprends qu’on prenne parfois beaucoup de retard.
Les aiguilleurs ont toujours des carnets en réserve et le conducteur peut toujours noter sur une feuille vierge. Car l’aiguilleur peut soit lui apporter l’ordre directement soit lui dicter le texte complet par radio.
Cela sera d’ailleurs soumis à « collationnement » afin de vérifier que tout a été compris correctement (pas d’erreur dans les kilomètres, etc…)
Une procédure archaïque? Si vous avez mieux on attend vos idées. Au-moins cette procédure a le mérite d’avoir fait ses preuves. Et mieux vaut être en sécurité totale mais en retard plutôt que de bâcler le travail pour gagner du temps et provoquer un accident vous ne croyez pas?