Et puis il y a les gens…

Dans la vie, il y a la famille, les amis, les connaissances et puis il y a… les gens. Tous ces humains que l’on ne connait ni de près ni de loin, cette masse informe à laquelle on prête des idées et des comportements. Eh bien nous, à la SNCF, nous sommes un certain nombre à travailler tous les jours directement avec les gens… et on réalise qu’ils sont tous différents.

Il y les fâcheux. Jamais contents de rien. Le train à 2 minutes de retard, scandale. Tu fais partir le train bien à l’heure alors qu’ils courent sur le parking, encore scandale. C’est une vieille rame : on y étouffe. C’est un TER flambant neuf: la clim est trop froide. Grève de contrôleurs: « ils foutent jamais rien ». Passage des contrôleurs: « ils sont toujours là à faire chier ». Ils peuvent vous gâcher une journée ceux là mais on les oublie vite car ils sont finalement très peu nombreux.

Il y a les distraits. Un sac de cours qui reste tout seul sur le quai après le départ du train des lycéens. Le casque du scooter qui reste dans notre bureau pendant six mois. Le vélo oublié en descendant du train.

"Les gens" attendent le train.
« Les gens » attendent le train.

Il y a les indécis qui veulent un billet pour le TGV du matin. Eh puis finalement ce sera le TER du soir. « Ah oui mais il met plus de temps… » Alors le TGV du matin. « Mais, sinon, le lendemain, y a pas mieux comme horaire ? » et on termine par un « bon ben je vais réfléchir et je repasserai ».

Il y a ceux qui ne doutent de rien. « Quoi, il n’y a pas de train direct entre Pont de Veyle et Bréauté ? ». « Ah mais vous ne vendez pas de timbres ? ». « Il me manque deux euros. Vous pouvez pas me faire quand même le billet ? ».

Il y a les partageurs. Ils sont tout contents de vous expliquer qu’ils traversent la France pour aller découvrir le nouveau né qui les fait grands-parents pour la première fois. Ils font du convoyage de voitures et partagent leurs bons souvenirs au volant d’une Aston Martin. Ils sont en route pour faire une partie du chemin de Compostelle et vous détaillent la belle promenade qui les attend. Il y a malheureusement ceux qui partent pour des enterrements ou visiter des malades et se déchargent d’un peu de leur peine.

Il y les pingres. Ils garent une voiture qui vaut le prix de ta maison ou pas loin pour venir ergoter des heures parce que, quand même, « un Paris – Lyon à 60€ l’aller retour, c’est vraiment cher ».

Il y a les enfants. On fait coucou au train. On regarde en coin le Monsieur qui sort sur le quai avec sa casquette et son sifflet. On se bouche les oreilles au passage des trains. On saute dans les bras de mamie qui vient de descendre du train. On a les yeux qui brillent quand le train répond à leur salut par un coup de sifflet.

Collègues conducteurs, faites coucou aux enfants, sifflez pour leur répondre, vous faites des heureux !

Il y les curieux qui posent mille questions sur le chemin de fer et repartent tout heureux d’une visite commentée du PRS et qui sont étonnés de tout ce qui se cache derrière un truc aussi simple qu’un train qui roule.

Bienvenue dans nos gares.
Bienvenue dans nos gares.

Il y a les arnaqueurs, malheureusement. On tente de se faire rembourser un billet plus que périmé. On passe un petit chèque vacances plus valide dans un paquet d’une dizaine. On se fait avancer les trois ou quatre euros d’un billet et on ne revient jamais.

Il y a les habitués. On serait à deux doigts de les faire passer dans la catégorie des connaissances. On connait leur boulot, leurs horaires, leurs congés et leur famille qui vient parfois les chercher à la descente du train. Eux aussi ils nous connaissent. Ils savent à qui demander une faveur ou un petit service. Ils s’attardent parfois à bavarder un peu du problème du train de la semaine dernière, de la météo, de l’actualité.

Il y a ceux qui vous touchent aussi. Cette jeune fille arrivée, un Dimanche soir, en pleurs à cause d’une rupture qui tournait mal. Cette maman célibataire qui se bat pour faire vivre ses enfants. Cette dame si heureuse de demander un abonnement travail après des mois de carte solidarité. Ce couple où l’un veille sur l’autre. Monsieur accompagne madame à son train après avoir vérifié qu’elle avait bien tout ce qu’il fallait. Madame qui vient accueillir monsieur à la descente du train. Et on les voit partir, main dans la main, à plus de cinquante ans.

Il y a les attentionnés aussi. La petite boîte de chocolat avec le petit mot manuscrit qui remercie de notre accueil tout au long de l’année. Le gros sac de cerises amené par un habitué « parce qu’il y en a tellement cette année ! ». Encore une boîte de chocolat pour avoir participé au sauvetage de passeports oubliés dans un train. Le détour par la gare juste pour déposer des bugnes toutes chaudes « parce que vous êtes vraiment tous gentils ».

Bref, il y a toute la diversité humaine dans nos gares et nos trains et nous sommes heureux de les transporter et de faire un peu partie de leur quotidien.